Sur l'Histoire Locale et Trielloise

La libération de Triel le mardi 29 août 1944

Interpellé par des élèves de 3ème du collège de Triel et par une professeure d'histoire d'une université parisienne sur la libération de Triel, fin août 1944, j'ai constaté que leurs connaissances à ce sujet étaient parfois erronées. Je me suis donc proposé de leur fournir une relation, plus conforme à la réalité, des évènements.

En 1994, pour le 50ème anniversaire de la libération, j'avais déjà écrit, avec ma sœur aînée et mon frère, une histoire de Menucourt, notre village natal, pendant la seconde guerre mondiale, et je connaissais les difficultés à recueillir et à trier les souvenirs des uns et des autres, surtout plusieurs dizaines d'années après les faits.

Pour Triel, j'ai donc consulté une dizaine de personnes, âgées de 10 à 25 ans en 1944, confronté leurs témoignages, et me suis évidemment servi du livre de Georges Beaujard et Daniel Biget : « Triel sur Seine, son histoire, ses légendes », fruit d'un long et sérieux travail de recherche, et de celui de Pierre Grand : « Triel sur Seine, 1939 à 1945, vie et souffrances locales ».

Monsieur Grand, engagé volontaire dans la marine dès 1939, ne vivait pas à Triel en 1939/1945, ni même en métropole, ce qui explique certaines erreurs, portant surtout, il est vrai, sur des faits survenus dans des communes voisines, Menucourt - où je vivais -, Boisemont, et quelques autres.

Je peux ainsi affirmer que Monsieur Cahen, que je connaissais bien, n'a pas été tué par une balle perdue mais assassiné le 23 avril 1944, dans son jardin, par un officier allemand logé à l'hôtel-restaurant « Les Coteaux », tout proche, ceci après avoir été menacé les jours précédents par le même militaire.

De même, à Menucourt, si une mine en bas de la rue de la Mairie a sérieusement endommagé la billerie voisine, aucune maison n'a sauté et il n'y a jamais eu de cadavres de Français et d'Allemands dans les rues. Le 29 août, l'un des deux poseurs de mines allemands qui s'enfuyaient a semble-t-il été tué par une rafale de mitrailleuse ; la veille, un moine franciscain de Carrières sous Poissy (Jules Givone), envoyé en éclaireur, avait été tué par un Allemand en bas de la côte qu'il descendait à vélo. Ce furent les deux seules victimes, d'autres habitants échappant il est vrai de peu à la mort, le dimanche 27 août.

Robert Bréant - Mars 2009.

 

TRIEL SUR SEINE, en 1944

Notre ville comptait alors environ 4000 habitants, aux maisons groupées pour la plupart entre la Seine et la ligne de chemin de fer, ainsi que rues Galande, de l'Hautil et Saint Marc. Le rez-de-chaussée des maisons de la rue Paul Doumer était occupé par une double rangée de commerces, depuis l'église jusqu'à la propriété Senet. Le reste du coteau, si on excepte les hameaux de Pissefontaine et de l'Hautil, était à peine construit : on ne comptait que quelques maisons, en meulière, à Cheverchemont, rue des Frères Martin, rue des Temporets, avenue des Fontenelles et surtout rue Gallieni. Quelques belles propriétés bordaient d'autre part la rive gauche de la Seine.

Le coteau, comme la plaine, était cultivé par près de quatre-vingt dix exploitants agricoles, employant outre les membres de leur famille, un ou deux ouvriers à temps plein et des femmes de journée en fonction des besoins ; ils fournissaient en légumes et en fruits les Halles de Paris et les marchés des environs. D'autres Triellois travaillaient dans les carrières de gypse, parfois transformées en champignonnières et surtout dans des magasins et bureaux de Paris et de sa banlieue. Triel comptait aussi un bon nombre d'artisans et quelques entreprises plus importantes, Grelbin par exemple, qui exportait sa production de chaudronnerie dans le monde entier.

Triel n'a pas trop souffert pendant l'occupation. Le rationnement, les restrictions furent atténuées, dans le domaine alimentaire, par les produits des jardins privés et des champs des maraîchers. Cependant, un bon nombre d'habitants passèrent cette période en Allemagne, faits prisonniers en 1940, ou déportés à partir de 1942, ou bien encore « requis » au titre du STO (Service du Travail Obligatoire).

Dès 1941, plusieurs hommes, MM. Delporte, Papillon (Notaire), Guillotin et les deux frères Visbecq avaient déjà été arrêtés, pour des raisons politiques, mais heureusement libérés au bout de six mois.

Au début de juin 1944, un bombardement visant les ateliers de chemin de fer de Verneuil-Vernouillet brisa non seulement de nombreuses vitres, rue Paul Doumer en particulier, mais blessa aussi grièvement un ouvrier agricole, Auguste Sueur, qui ramassait du foin rive gauche et dut être amputé d'un bras. Quelques jours plus tôt, un chasseur-bombardier anglais, touché par la Flack allemande, s'était délesté de quelques bombes aux abords de Pissefontaine avant d'aller s'écraser dans un champ de Chanteloup-les-Vignes. Le pilote avait sauté en parachute. C'est à la fin d'août 1944 que Triel allait être beaucoup plus touché par cette guerre, qui durait depuis cinq ans.

 

TRIEL SOUS LES OBUS

La nouvelle du débarquement en Normandie, le 6 juin 1944, s'est vite répandue. Des Triellois avaient en effet conservé leur poste de TSF (la radio !) et écoutaient Radio-Londres : « Les Français parlent aux Français ». D'autre part, la progression des troupes put ensuite être aisément suivie, grâce aux cartes diffusées par les journaux, pourtant sévèrement contrôlés et censurés : les noms des villages et non seulement des villes, y étaient en effet indiqués.

Au début d'août, les armées alliées atteignaient la Seine. Une colonne réussit à traverser le fleuve à Dennemont, en aval de Limay. De furieux et sanglants combats se déroulèrent, du 15 au 30 août, de Fontenay Saint Père à Meulan, puis de Meulan à Sagy. Heureusement, les alliés avaient la maîtrise de l'air.

Plusieurs paysans triellois, notamment les beaux-frères Joseph Leroux et Albert Lechasseur, requis par les Allemands avec leurs chevaux et leurs voitures, se retrouvèrent à Drocourt en pleine bataille et échappèrent de peu à la mort. Libérés plusieurs semaines plus tard, ils ne retrouvèrent Triel, avec leurs attelages, qu'après la libération.

De Meulan, un groupe d'Américains, avec quelques chars, gagna Vaux sur Seine et, de là, Menucourt, atteint le mardi 29 août, vers midi. Une autre colonne alliée avait suivi la rive gauche de la Seine, s'était emparé des Mureaux et de son usine d'aviation (Pélabon), puis de Verneuil et Vernouillet le 25 août, et enfin de Poissy.

De la rue des Créneaux, on put ainsi apercevoir, avec une longue-vue ou des jumelles, divers véhicules militaires le long du mur de la ferme de Marsinval. Un gendarme et des enfants de Triel se risquèrent même au bord de la Seine pour observer des soldats américains se protégeant derrière le muret d'une propriété de la rive gauche ; mais des soldats allemands descendaient de l'Hautil et il fallut déguerpir.

Dès le vendredi 25 août, certains Triellois particulièrement intrépides, ou inconscients, traversèrent même la Seine en barque pour rencontrer les libérateurs : ceux-ci leur offrirent du chocolat et des cigarettes.

A partir du 25, mais surtout du 26, des obus commencèrent à tomber sur Triel, notamment dans la rue des Créneaux, chez Madame Girard, Madame Stervinon, chez Eugène Bellemère (un réservoir fut touché), dans une chambre de la famille Auffray (heureusement descendue à la cave), chez Marcel Vallin (un obus fracassa la porte très peu de temps après la sortie de sa femme et de leur bébé, qui allaient se réfugier dans une cave voisine), chez Madame Sudre et Madame Ozanne, dans le jardin de Maître Papillon, notaire, mais aussi rue Gallieni chez Madame Pestel, rue du Docteur Sobaux, rue de L'Arche...Au total, cent-vingt maisons furent touchées.

Du côté de Triel, quelques canons allemands répliquaient. Les Triellois s'étant réfugiés dans les caves, - celles des cultivateurs, descendants de vignerons, étaient particulièrement vastes et profondes -, il n'y eut aucun blessé. Lors des alertes aériennes, les élèves de l'école des filles avaient d'ailleurs l'habitude de gagner plusieurs caves proches de la rue des Créneaux (chez Huet, Leroux, Lechasseur). Fin août 1944, quarante sept personnes se retrouvèrent dans celle de René Huet ; parmi elles, la famille de Monsieur Rodier, Maire de Triel sur Seine depuis le 30 octobre 1941 (il avait succédé à M. Urbin, mort subitement.)

 

DANS LES CARRIERES SOUTERRAINES

Le samedi 26 août, un soldat allemand ayant été blessé à Triel par deux gars de Chanteloup, un officier se présenta à M. Rodier et exigea qu'on lui livre des otages. M. Rodier et son adjoint, René Pion, s'offrirent, mais l'officier, les sachant innocents, refusa. Il donna alors l'ordre d'évacuer toute la population vers le nord, à quinze kilomètres au moins de Triel.

Représailles, volonté de protéger les civils ou au contraire, de s'en servir comme boucliers contre les attaques aériennes...En tout cas, les habitants de Carrières sous Poissy et de Chanteloup, reçurent le même ordre le lendemain, dimanche 27, et durent fuir tôt le matin du 28 jusqu'à Menucourt, dont ils rejoignirent les habitants dans la carrière.

A Triel, le Docteur Bouvet, conseiller municipal et chef du service médical et des postes de secours, qui parlait l'allemand, mais aussi l'anglais, se rendit jusqu'à un poste allemand de transmissions rue de l'Hautil, et téléphonant aux autorités allemandes, il obtint que les populations puissent se réfugier dans les carrières de Triel plutôt que de partir sur les routes.

Les obus américains continuaient à pleuvoir par moments sur Triel. De plus, le dimanche 27 août, au début de l'après-midi, deux avions britanniques surgirent à basse altitude et se mirent à mitrailler copieusement les bois de l'Hautil, ainsi que le haut du village de Menucourt ; quelques bombes y furent même lâchées, endommageant plusieurs maisons et tuant deux chevaux près du cimetière. Des habitants, vite avertis, se précipitèrent et dépecèrent au plus vite les cadavres ! Le mitraillage de la forêt se poursuivit le lendemain, lundi 28.

Le danger grandissant, M. Rodier se fit ouvrir la Poste, alors située rue du Pont, par un serrurier, M. Legendre. Le bureau était évidemment fermé le dimanche. Il parvint à téléphoner à l'Etat-major américain à Poissy et obtint que la canonnade cesse le lendemain lundi, de 5 heures à 9 heures du matin.

Avertis comme prévu par le tocsin et par les gendarmes, passant de porte en porte, les triellois purent ainsi gagner sans danger les carrières, en un nouvel exode à pied, poussant brouettes, vélos, remorques...ou avec des voitures à cheval, chargés de matelas, de couvertures (il ne faisait que 13° à l'intérieur, contre une trentaine dehors !) d'ustensiles divers, d'assiettes et de couverts, de nourriture...M. Tremblay avait même emmené sa vache, dont le lait put ainsi nourrir les jeunes enfants.

Au total, près de 3000 personnes se réfugièrent à la Bérangère, 500 à 600 autres à la carrière Bourdet à Pissefontaine et enfin, quelques familles à celle de la rue de l'Arche. Quelques personnes, surtout des vieillards, refusèrent cependant de quitter leur maison, par claustrophobie peut-être, ou tout simplement par peur d'être cambriolés pendant leur absence, crainte qui s'est avérée justifiée...

Les carrières de gypse, très vastes et très profondes - jusqu'à quatre-vingt dix mètres sous la surface de l'Hautil - étaient un excellent abri, non seulement contre les obus, mais aussi contre les bombes. Elles avaient d'ailleurs failli être utilisées par les Allemands comme entrepôts de bombes volantes, les V1. Dès le début de la guerre, la Municipalité et M. Grelbin, chargé de la défense passive, avaient fait aménager la Bérangère, en haut de la rue de l'Hautil. La carrière disposait donc, fin août 1944, non seulement de groupes électrogènes, alimentant parcimonieusement des ampoules de 25 watts tous les cent mètres, mais aussi de postes de secours, de W.C, et de réserves d'essence, d'eau, de nourriture (pommes de terre surtout). Les animaux domestiques et de basse-cour y étaient interdits. Celle de Pissefontaine, près de l'immeuble actuel « Bel horizon », n'était pas équipée, mais les carriers, souvent d'origine italienne ou polonaise, nombreux dans ce hameau, emportèrent leurs lampes à carbure (acétylène), dont l'éclairage fut très apprécié.

Dans l'une comme dans l'autre, la vie s'organisa tant bien que mal. Il fallait de temps en temps sortir pour aller chercher de quoi manger. Les boulangers continuèrent à faire du pain, distribué à raison de 200 grammes par personne, avec un demi-litre d'eau, chaque soir.

C'est lors d'une sortie de la carrière de Pissefontaine à celle de la Bérangère, où quelques individus semaient le trouble, le lundi 28, au début de l'après-midi, que fut tué d'un éclat d'obus qui lui sectionna une artère fémorale, le lieutenant de Pompiers Edouard Lecomte parti avec le gendarme Lefevre et M. Baton, qui ne furent, eux, que légèrement blessés.

Ce même lundi, dans la soirée, les derniers Allemands quittèrent Triel, emmenant avec eux plusieurs cultivateurs avec chevaux et voitures ; l'armée allemande, manquant de carburant, utilisait en effet dans sa retraite toutes sortes de véhicules, y compris vélos et landaus. La nuit suivante, un de ces cultivateurs, René Vallin, réussit à s'échapper d'Ableiges, avec un cheval, à travers champs et forêt, pour regagner Triel. Le bruit avait cependant alerté les Allemands, qui stoppèrent toute autre tentative de fuite. Henri Vallin et Gilles Bellemère réussirent quand même à s'esquiver, à pied, préférant abandonner leur cheval, qui ne fut jamais retrouvé.

René Vallin emmena le sien à la Bérangère, mais lorsqu'il en sortit, le mercredi 30, il eut la douloureuse surprise de constater que son cheval était devenu aveugle. Les Allemands ayant quitté Triel, des habitants seraient allés prévenir, en traversant la Seine à la nage ou en barque, les Américains que la canonnade n'avait plus de raison de se poursuivre ; le fait est qu'elle s'arrêta. Le séjour dans les carrières connut aussi d'heureux évènements : la naissance de deux enfants, Chantal Ciza le mardi 29 à 5 heures et Jean-François Blondy, le lendemain à 15 heures, les mamans étant assistées par le Docteur Bouvet et Madame Delporte, sage-femme.

 

LA LIBERATION

Le mardi 29 août, à 14 heures, les premiers Américains furent aperçus à Cheverchemont. Une heure plus tard, ils arrivèrent dans le bas de la ville, à la mairie. Ils ne venaient donc pas de Vaux sur Seine ou de Vernouillet, mais de Poissy, où ils avaient pu traverser la Seine, pour atteindre ensuite Carrières, Chanteloup et Pissefontaine. Notons que les Allemands, avant de partir, avaient fait sauter les pontons du bac de Triel, de part et d'autre du fleuve.

L'arrivée des troupes alliées fit brusquement sortir de l'ombre des « résistants », membres des FFI (Forces Françaises de l'Intérieur) commandés par M. Legrand, lieutenant de réserve. Pendant l'occupation, il n'y avait pas eu de résistance armée à Triel - le territoire ne s'y prêtait pas - mais un petit groupe de Triellois y fabriquaient de fausses cartes d'alimentation et faisaient passer en Angleterre, via la Bretagne ou l'Espagne, des aviateurs alliés dont l'avion avait été abattu. Plusieurs de ces résistants avaient été arrêtés, dont Thérèse Le Thias, le 6 août 1943, qui mourut dans le camp de concentration de Ravensbrück le 6 août 1944, ainsi que Henri Brialy et Roger Guillon, ce dernier réussissant cependant à s'échapper du train qui l'envoyait en déportation.

A côté de ces authentiques résistants apparurent, à Triel comme ailleurs, des personnages moins recommandables, d'autant plus effrayants et dangereux qu'ils étaient armés. On les appelait les « résistants des carrières ». Ayant passé la nuit dans la salle des mariages de la mairie, ils la laissèrent dans un état déplorable. Ils furent les premiers à aller arrêter, dans les carrières, certaines personnes accusées d'avoir collaboré avec l'ennemi. « C'est le nouveau régime, les honnêtes gens sont arrêtés par les voleurs ! » s'écria l'une d'elles. Tout le monde compris à quoi elle faisait allusion, aussi fut-elle vite relâchée...

Ces soi-disant « collaborateurs » furent donc conduits à la gendarmerie et interrogés. L'un d'eux, il est vrai, s'était engagé dans la milice, police politique créée le 30 janvier 1943 pour traquer les résistants qui n'hésitait pas à torturer et à assassiner les opposants au régime de Vichy. Cet homme bien connu avait un soir reçu devant chez lui une vigoureuse rossée par trois jeunes Triellois. Condamné à mort par la justice, il fut exécuté. Un autre avait combattu sur le front de l'est dans la Légion des Volontaires Français (LVF), ce qu'il paya de quelques années de prison. Leurs parents furent aussi arrêtés. D'autres passèrent aussi plusieurs mois en prison, avant d'être jugés et innocentés. Les tribunaux étaient en effet débordés : bien des gens voulaient profiter de la situation pour assouvir des rancunes plus ou moins justifiées.

D'autre part, scène malheureusement habituelle lors de la libération, quatre femmes, dont la mère du milicien, furent tondues sur la place de la mairie par la femme du coiffeur déporté, devant une foule nombreuse et très excitée. « Ce n'était pas beau », déclarent des témoins.

Dès leur sortie des carrières, repoussée par précaution au mercredi 30 août à la demande des Américains, qui interdirent aussi de sonner les cloches afin de ne pas avertir l'ennemi de leur progression, des Triellois hissèrent des drapeaux français et parfois américains à leurs fenêtres, quelquefois avec une hâte excessive, les Allemands pouvant encore revenir. Le balcon de la mairie, lui aussi pavoisé, accueillit les principaux résistants et en particulier le Docteur Buchalter, fraîchement revenu du maquis du Limousin qu'il avait rejoint pour éviter d'être arrêté comme juif. Il y était devenu le Commandant « Poissy ». Il devait malheureusement se tuer en moto quelques années plus tard.

 

LE RETOUR A LA NORMALE

Dès le mardi 29 août à 19 heures, le Lieutenant de réserve LEGRAND, représentant officiel du Gouvernement provisoire de la République française, prononça la dissolution du Conseil Municipal de Triel sur Seine et nomma à sa place un comité provisoire de gestion, composé de neuf membres. Le comité se réunissait deux fois par jour à la mairie pour traiter du ravitaillement, des transports (fortement perturbés par les bombardements des ponts, des gares, des lignes de chemins de fer), et de la reprise économique.

L'une des premières décisions fut d'organiser les obsèques solennelles du Lieutenant Lecomte, en présence d'une foule nombreuse.

Le 2 septembre, M. Legrand mit en place un véritable conseil municipal de 18 membres. M. Rodier fut maintenu comme maire. Le 16 décembre suivant, un arrêté préfectoral imposa d'y ajouter cinq autres membres, reconnaissant ainsi leur action dans la résistance. Le maire et ses trois adjoints restèrent à la tête du conseil jusqu'aux élections du 29 avril et du 13 mai 1945, qui propulsèrent au pouvoir une nouvelle équipe, ayant à sa tête un maire communiste, M. Lafontan.

Une vie normale s'installa peu à peu. Il fallut cependant attendre trois semaines pour disposer à nouveau de l'électricité, donc de l'eau courante, certaines lignes électriques ayant été détruites par les obus. En attendant la reconstruction des ponts, il fallut utiliser des barques, puis des péniches et enfin des bacs pour traverser la Seine et l'Oise. Une passerelle provisoire fut construite à Triel, réservée aux piétons, en attendant un pont, le dernier reconstruit dans la région, un peu en amont de l'ancien, la rue du Pont conservant cependant son nom.

Le rationnement fut maintenu pendant des années, les rations s'améliorant progressivement. Il fallut attendre 1949 pour que disparaissent les dernières cartes d'alimentation.

A partir du 8 Mai 1945, date de l'armistice mettant fin à la guerre, les prisonniers, déportés et requis du STO, furent rapatriés, certains dans un piteux état, après un périple parfois invraisemblable par l'URSS et la Suède. Leur histoire mériterait elle aussi d'être racontée.

Inversement, des prisonniers allemands furent affectés, jusqu'en 1947, dans plusieurs exploitations agricoles de Triel. Ils y furent en général, mais pas toujours, bien accueillis et purent apprécier l'adage allemand : « Heureux comme Dieu en France ! ».

Des relations amicales purent même s'établir entre anciens prisonniers, français ou allemands, et les paysans qui les avaient hébergés. Les contacts se maintinrent pour certains après leur libération, prélude à une réconciliation plus large et plus officielle entre les deux pays.

 

Récit de Robert,

Edité par « Triel, Mémoire et Histoire » - Mars 2009 -

Related Articles

Connexion

Qui est en ligne

Il y a 228 invités et aucun membre en ligne

Free Joomla templates by Ltheme