Les Mémoires Vives

Mémoires vives - Entretien avec une paroissienne

Entretien de Dominique Aerts avec une paroissienne de 89ans, en janvier 2012, en sa demeure à Triel.

 Les vocations

Plusieurs jeunes natifs de Triel sont devenus prêtres :

René Chineau, prêtre missionnaire, parti en Malaisie, a été ordonné prêtre vers 1950, revenu malade, il est rentré en maison de retraite à Lorris dans le Vaucluse. Il est mort là-bas.

Michel Malassigné et François Zeller.

Comme religieuses, Triel a donné :

  • La sœur de Madame Coulon, une fille Sueur appelée en profession Sœur Bernadette, en mission à Madagascar à Farafangana . (filles de la Charité)
  • Une sœur de l’institutrice Mlle Nivet et Annie Auroux, en religion Sœur Anne Mariam, dans une congrégation en Israël, à Bet Shemesh (moniales de Bethléem).

Elle est revenue en France à St Laurent du Pont.

  • Dans la famille Chineau, il faut citer Hélène et Suzanne.

Hélène Chineau était religieuse bénédictine. On est allée la voir plusieurs fois à Pradines, à l’Abbaye St Pierre - St Joseph, dans la Loire. Auparavant, elle était chez les chanoinesses de St Augustin, la même congrégation que les sœurs qui s’occupaient de l’école Notre Dame de Triel mais vers 1968, de nombreuses congrégations ayant renoncé à leurs tenues religieuses, elle a préféré changer de congrégation, elle est partie chez les Bénédictines.

A Pradines, il y a le couvent, à côté l’Hôtellerie et de l’autre côté de la rue, la maison des familles. Les familles des religieuses sont logées dans cette maison lors de leur visite. Nous étions 14 à manger là avec les cousins d’Hélène. Après nous avons pu goûter avec Hélène et la Supérieure. Hélène était née le 1er octobre 1922, moi en 1923. On avait 6 mois d’écart.

Vers 1990, Suzanne Chineau, sa sœur, nous avait invités mon mari et moi, dans son monastère. Elle n’avait pas le droit de prendre ses repas avec les visiteurs, bien sûr, mais on a pu assister à la messe. Elle m’a proposé de porter les offrandes. Je l’ai fait et j’ai été très émue. C’est d’ailleurs la seule fois que je l’ai fait.

  • Récemment, il me semble, à vérifier, Camille Lescuyer de Chaptal et encore une autre.

Pour poursuivre sur la famille Chineau, Raymond, le père de René, Hélène, Pierre et Suzanne a joué de l’orgue à l’église de Triel, pendant 51 ans. Il doit être mort dans les années 70. Il était aveugle et jouait parfaitement. Il allait tout seul faire les enterrements en dehors de Triel ; il se déplaçait aidé de sa canne blanche. Il prenait le train. De nos jours, vu la circulation, cela me semblerait difficile. Il habitait la rue St Vincent, presque en bas après le lavoir, pas la première porte quand on remonte la rue, mais la deuxième oui, peut être bien chez Bardin, du côté de la résidence des Berges. Son fils, Pierre Chineau dit Pierrot est parti chez les Emmaüs dans les Pyrénées, je ne sais plus où. Il est mort là-bas.

 

Le patronage

ID615 01Le patronage faisait partie de ma vie. Les garçons étaient à la cité St Martin avec les frères de Carrières comme animateurs. Pour les filles, on allait à la salle Jeanne d’Arc, rue du docteur Sobaux. On nous proposait des séances de cinéma,  des séances d’animations, de jouer des pièces de théâtre. Un jour, il voulait que je chante toute seule. Je suis allée répéter chez Mme Guillet. Mr Chineau et Hélène, sa fille m’accompagnaient. Jamais je n’aurais pu chanter toute seule. Alors du coup, comme Hélène assistait aux répétitions, on a chanté toutes les deux.

Vers mes 11 ans, ils ont monté une pièce de théâtre mais je ne me rappelle plus du nom ; Monsieur Chineau faisait la voix d’homme, mais on ne le voyait pas il restait dans la coulisse. Emilienne Julien devait tenir le rôle qui m’a été au final confié. En rentrant, la première chose que je devais faire sur scène, c’était de me fiche par terre, ça, ce n’est  pas évident. Jouer dans une pièce de théâtre, c’était quand même mieux  que les jeunes avec internet.

 

 

Dans la salle Jeanne d’Arc, il y avait une scène de théâtre en haut. J’ai regretté quand ça a été tout chamboulé. (Suppression de la scène). On aurait pu faire des choses avec les jeunes.

Melle Madeleine Groshenry, la directrice était formidable. Melle Marcelle Langlois l’aidait et

nous, nous étions contentes. A l’époque, on allait même se promener dans les bois. On avait des activités, on cousait.

 

La vie paroissiale

ID615 02Mr Zédé était le bedeau et il habitait sur la route de Poissy ; Il y a eu aussi Monsieur Bricout. Les bedeaux étaient habillés en suisse avec hallebarde et canne avec pommeau, ils faisaient le cortège avec les enfants de chœur. La chaisière était Madame Dupré, elle faisait payer les chaises.

Moi, j’ai fait partie de la chorale, avec les Trachier, avant de me marier. Je me suis mariée en 46 et j’ai arrêté, avec les enfants .... J’y suis retournée plus tard avec  Max Legendre.

Il jouait de l’orgue et  avait repris la charge derrière Mr Chineau, du temps du curé de Goascaradec.

Après Max, du temps du curé Jean Jacques Villaine et du curé Jean Louis Feurgard, il y a eu Mr Boussac, titulaire des orgues à St Germain.  Puis Mr Dieudonné qui venait de Poissy.

Toujours du temps de Feurgard, Mr Bourelly qui tenait les orgues dans la collégiale de Mantes a repris le flambeau mais avec le père Bellomo, la chorale liturgique a été supprimée après plus de 20 ans d’existence.

 

L’enfance

Je suis née en Bretagne.  Nous sommes arrivés à Triel en octobre 1925, j’avais deux ans et demi.

Nous venions du Finistère ; je suis née au vieux bourg de Quimper, dans le canton de Châteaulin, dans les hauteurs, au bon air. Il n’y avait pas beaucoup d’habitants. L’église était en ruine, mais le clocher, toujours debout, a tenu malgré la tempête.

Papa était au chemin de fer. Le travail l’a envoyé en région parisienne. Il est parti seul en avril 1925 pour chercher un logement. Quand il a trouvé un logement il nous a fait venir. Pour mon mari, c’est pareil. Il était des Côtes du Nord. Ses parents sont venus aussi pour le travail. Ils étaient dans la culture.

On a habité d’abord au 10 rue Galande, c’est là que ma sœur est née. Mon frère, avec qui je m’entendais bien, et moi,  tous les deux, on est nés en Bretagne. Il a dit un jour à ma mère :

«  T’aurais dû rester en Bretagne, comme ça, t’aurais pas acheté Marie Louise ». On était 3 enfants.

Après la rue Galande, on a été impasse Dupuis, à côté de la boulangerie, vers le 178 rue Paul Doumer.

 

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Je suis allée à l’école des filles, rue des Créneaux. Comme institutrices, il y avait Mme Magnan, Melle Tissier. Il y avait trois classes à l’époque. Après il y en a eu une sous le préau. Il y a eu Melle Mazure qui s’est noyée au puits artésien. Elle s’est baignée et s’est noyée. La directrice était Mme Barbier. Yvonne Le Fustec était aussi à l’école en même temps que moi.

J’ai quitté l’école en 1937, j’avais 14 ans, mes parents n’avaient pas les moyens de me faire continuer.

J’ai été en apprentissage en bas de la rue des Créneaux, chez Mme Moreau, une couturière ; c’est la maison qui a les volets verts à côté de la forge. C’est Mme Moreau qui était couturière, j’étais avec une fille de Chanteloup, Karine Bideau.  Qu’est- ce qu’on a pu se faire suer, j’y suis restée 18 mois. On a débâti, surfilé, cousu des boutons. Voilà, c’est tout ce qu’on a appris en 18 mois. Quand Mme Moreau allait aux essayages, on était contentes car au moins, on pouvait rigoler un peu. Quand elle est repartie dans son pays,  j’ai retrouvé une autre couturière, Mme Guillomin, sur la route de Vaux, au Manoir, une petite porte. Là, j’ai appris à coudre, j’y suis restée 9 mois J’ai fait ma robe de mariée. Ah oui ça changeait, je me suis faite un costume, j’ai fait la robe de maman et celle de ma sœur,  Marie Louise, pour mon mariage. Quand j’étais enceinte, je me suis même faite une robe et un manteau. Tu sais ce qui  m’a coupé mon élan, c’est le jour où j’ai eu les jumeaux. On s’est retrouvé à sept. Avant, je faisais les robes de ma fille, ses jupons, mais là, ça a été fini la couture.

 

L’école Notre Dame

ID615 04Les sœurs sont arrivées à Triel en 1940 et ont créé l’école Notre Dame, au 109 rue Paul Doumer. Cétait une maison assez grande puisqu’elles en ont fait l’école, c’était la tante de Michèle Quinaillier, Mme Chapelet qui possédait cette maison et après si ma mémoire est bonne, elles ont loué aussi, une grande propriété, en  bord de Seine, dans le bas de  la rue St Vincent. Elle a servi pour les classes des grands.

Je ne suis pas allée à l’école Notre Dame. En 40, je n’allais plus à l’école.

Mais je ne te dirais pas le nombre d’années passées dans l’atelier couture de l’école Notre Dame. Plus de 20 ans. Les Mamans n’étant pas trop disponibles, la directrice, Melle Thérèse, a fait appel aux grands-mères. C’est une de mes belles-filles qui m’a donné l’information. Je suis allée à la réunion et voilà. Dans les derniers temps de sa direction, elle m’a dit : « le jour où vous arrêterez, il n’y aura plus d’atelier couture ». Il paraît qu’il n’y a même plus d’ateliers du tout.

 

Les fêtes

Il y avait la « Fête du Pont », tous les ans, en septembre, de l’autre côté de l’eau, au vieux pont en bois. En 1938, on a fêté les 100 ans du pont. Ils n’auraient pas dû le faire sauter, n’importe comment les tanks n’auraient pas pu passer dessus.

Il y avait aussi la fête à Triel, place du marché et la fête à Pissefontaine.

J’ai un souvenir qui n’a pas plu à maman. Avec Hélène Altier, comme il y avait des trucs pour les gosses, on est partie à la fête un lundi après midi, sans le dire, au lieu d’aller à l’école.

Il y avait aussi des défilés de chars fleuris mais je n’ai pas de photos. Les défilés de chars c’était quelque chose.

 

Les commerces

Au niveau du pont, à la place du restaurant arabe, « chez ma Cousine » et de l’immobilier, il y avait trois boutiques. Au milieu il y avait Mme Portebois qui était blanchisseuse, et c’était un bourrelier Monsieur Lelu qui faisait l’angle et un café. Après c’était l’impasse et après Mr Portebois, l’épicier. Quand il grillait son  café Monsieur Portebois, ça sentait bon. Il était en face de la rue du Dé.

Le père Bourbon vendait des asticots pour la pêche : je ne sais pas s’il n’en mangeait pas dans sa boutique.

La marchande de journaux, Fifine  Nemane avait un poêle dans sa boutique et un chat. Un jour, mon mari, il avait 15-16 ans,  avec ses copains  avaient pris et installé le chat dans la salle  Jeanne d’Arc, dans la pièce du fond. Celle qui a la porte vitrée. Ils l’ont mis sur une étagère, ils voulaient dresser le chat. Quand ils ont vu le chat hérisser ses poils, ils l’ont vite laissé filer. Fifine a dit : « je ne sais pas ce qu’il est devenu mon chat, je l’ai pas vu pendant deux jours ».

Une autre fois, sur la place de la gare, dans une des maisons, il y avait une grille et un vieux général peu sympathique. Le général était anticlérical et râlait quand les enfants de chœur chantaient dans la rue au moment de Noël et demandaient quelques pièces. Alors un soir, en revenant de la gymnastique, ils avaient pris des bougies et ils avaient piqué les bougies sur les piquets de la grille. Ils ont allumé, ils ont tiré la sonnette et se sont cachés. C’est des trucs de gamins.

Par ailleurs, mon mari était secrétaire de l’Avenir, association de gymnastique, au début paroissiale et, nos jumeaux sont allés à l’Avenir. Le président de l’association était Monsieur Gaston de Chirac, médecin, dans la rue du Pont.

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Les enfants de l’association « L’Avenir » conduits par Louis Malassigné

Voilà, quelques brides de vie et souvenirs, livrés à votre lecture.

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